Bienvenue

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Communiquer avec vous, à partir des thèmes qui m'intéressent, et pour lesquels je souhaite vos réactions : l'actualité, les livres, les films, les musiques, et bien sûr les différents sujets auxquels la vie nous confronte.

lundi 20 avril 2015

Amitié et trahison

Ce n'était pas un ami. C'était mon ami. Depuis trente ans, nous partagions les mêmes enthousiasmes professionnels et organisions ensemble des manifestations psycho-pédagogiques pour la réussite desquelles nous faisions face à tous les obstacles rencontrés. Sans doute, parce que nous étions deux à vouloir le meilleur pour nos stagiaires, avons-nous été récompensés par de chaleureuses gratitudes. La vie nous a rapprochés, liés. Aucun sujet ne pouvait être tabou entre nous, même ceux qui relèvent des secrets de la sphère privée. Nous étions le confident intime de l'autre. L'amitié n'aurait pu s'interrompre qu'avec la fin de la vie. C'est ce que nous croyions, c'est ce que je croyais. Un jour, il y a quinze ans, il a annoncé la rupture au téléphone, sans aucune justification, se dérobant à mes demandes d'explications, à mes suppliques, à mon désespoir devant ce qui était incompréhensible. Depuis toutes ces années, le chagrin s'est peu atténué. J'ai eu le temps d'échafauder des hypothèses en recoupant des petits faits qui nous concernaient mais surtout qui relevaient de l'hostilité de notre entourage et particulièrement du sien.
 La lâcheté, ce n'est pas tant la rupture que la dérobade.

samedi 18 avril 2015

Le foulard rouge

Après un long travail consacré à sa fabrication, la chaussure finie s'affranchissait des mains de notre grand-père Nino. Sans nous concerter, nous, les enfants, nous approchions de la vanguitte pour admirer l’œuvre terminée. Le cuir galbé, l'empeigne brillante, la semelle impeccablement ciselée, le talon à la bonne hauteur épousaient par avance le pied qui aurait la chance d'être chaussé par cet artisan d'exception. 
Les opérations terminées, grand-père se livrait à deux ultimes finitions :
* gratter le centre du cuir de la semelle pour prévenir les risques de glissade du futur marcheur.
* faire reluire l'empeigne avec le foulard rouge. Celui-ci n'était pas un simple tissu doux et propre, choisi pour sa texture particulière. C'était l'ultime cadeau que grand-père reçut de son père.  Mon arrière-grand-père avait porté le foulard toute sa vie de maçon autour du cou et même après, quand l'explosion de la mine l'avait privé de ses yeux.  A l'approche de sa mort, il avait appelé Nino. La main du fils s'était ouverte. Flambeau paternel à un fils bien aimé.
Grand-père pleure en caressant l'empeigne. Le foulard rouge frôle, glisse, murmure. 
Grand-père pleure ses disparus, ses parents, ses sœurs et ses frères fauchés en Sicile dès leur jeune âge, et son cher petit Joseph enterré à Catane à deux ans. Il pleure son enfance turbulente, sa jeunesse laborieuse de soutien de famille, sa terre natale.
Face à cette belle chaussure qui va dès demain vivre une existence remarquable, il dit : "Je veux retourner dans mon pays. Je veux mourir chez moi."
Ces mots nous atteignaient profondément et creusaient notre impuissance à le consoler. Ils témoignaient de l'impossibilité, malgré une intégration sociale réussie, à faire le deuil de ce qui l'avait constitué, construit.Nous ne lui en voulions pas. Nous l'aimions trop pour ne pas percevoir toute la détresse de l'âme. 
Jusqu'à sa mort, grand-père nourrit une nostalgie sans répit quant à ses origines. Il se sentait à demi-français seulement, lui qui parlait et écrivait la langue de l'intégration presque aussi parfaitement que ces académiciens qu'aujourd'hui j'admire.

mercredi 1 avril 2015

Ecole, maltraitance et pédophilie

Bien sûr,  ce sont les textes de lois et leur application qui doivent protéger nos écoliers des prédateurs sexuels et des enseignants maltraitants. Mais, que les uns et les autres, qui prétendent aujourd'hui à Vlleneuve ne pas avoir été mis au courant à temps, cessent de jouer les Tartuffe! Je sais de quoi je parle. Pendant 22 ans, j'ai été Inspectrice de l'Education Nationale et forcément confrontée ici ou là à des pratiques honteuses.  Des enfants étaient touchés, d'autres maltraités...
- Oui, ces pratiques étaient connues. Dans une commune, à la sortie des classes, les gens parlent, la rumeur se répand.
- Oui, il a fallu se rendre dans les écoles, pour s'informer des faits mais aussi pour rencontrer ceux qui étaient mis en cause. Je l'ai fait. Un directeur à C. frappait les enfants qu'il avait 'dans le nez', les insultait, inventait des punitions raffinées. J'ai constitué un dossier, recueilli des témoignages d'enseignants et de parents, puis demandé la tenue d'une commission disciplinaire. Le 'cher homme' a été si bien défendu par le (ou les) syndicat(s) en présence qu'il a été blanchi. Ma hiérarchie m'a demandé au cours de la séance de me calmer ! Pour un peu, dans un délire hystérique, j'avais inventé de toutes pièces une accusation malveillante. La malade, c'était moi !
- Oui, il faudra bien un jour que les hiérarchies administratives prennent leurs responsabilités, coopèrent avec la Justice et cessent de craindre pour leurs petits avancements et leurs promotions. L'innocence dans laquelle nos enfants doivent grandir et construire leur avenir a bien plus de valeur que tout ce fatras de mesquins intérêts personnels. Je veux avoir confiance.