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Communiquer avec vous, à partir des thèmes qui m'intéressent, et pour lesquels je souhaite vos réactions : l'actualité, les livres, les films, les musiques, et bien sûr les différents sujets auxquels la vie nous confronte.

vendredi 5 janvier 2018

Laurent Stecker



Chère E.
Pourquoi le patronyme Stecker ? : je ne sais pas répondre. Je l'ai inventé et construit dans ma tête comme le bruit d'une voile qui claque dans la bourrasque, une voile prête à se déchirer et à entraîner le mât.
J'ai mis 4 années à écrire le roman, dont deux en tout petits pointillés durant la maladie de mon compagnon. Et durant tout ce temps, j'ai engrangé des informations, telles celles qui concernent le baseball, les lesbiennes de New York, les limonaires de collection et plein d'autres qui émaillent le roman.
Je me suis réjouie de présenter un superviseur antipathique, jugeant en permanence, narcissique et pervers, car il n'est pas éloigné du tout de ceux que j'ai fréquentés. Ma difficulté était de rendre plausible l'ambivalence de Geneviève à son égard : rancœur et intérêt professionnel malgré tout. Elle lui dit : "Tu n'es pas le plus mauvais à Paris".  Une donnée échappera peut-être au lecteur : ce que l'Analyse Transactionnelle appelle " le processus parallèle", la répétition de la colère entre Geneviève. et le superviseur, et ce qui va suivre entre le client Stecker et Geneviève. 
Je me suis inspirée de ma pratique pour le personnage de Geneviève. Je ne peux pas le nier. On écrit souvent avec ce que l’on est, avec sa matière intérieure, ses expériences. Cette femme me ressemble, c'est vrai. On m'a reproché d'être trop didactique dans les réponses de Geneviève. J'en ai tenu compte et j'ai éliminé quelques passages pédagogiques. Mais, je suis une ancienne institutrice, avec les qualités et les travers des enseignants ! Oui, cette femme est très seule, ce que je n'étais pas quand j'exerçais mon métier, mais c'est sans doute ma solitude d'aujourd'hui qui a déteint sur le personnage.
J'ai eu peu de patients genre Stecker en thérapie, ils lui ressemblaient, sauf en ce qui concerne le désir permanent dans le transfert de Stecker d'abolir les frontières professionnelles. Je suis entièrement d'accord avec toi : "Il lui restait trop à faire pour qu'il s'en sorte bien." C'est ainsi que je voulais son destin et sa fin tragique. Aussi, j'ai été contrariée par la réaction d'une amie qui a regretté la tournure finale du roman, me disant : "Moi, je voyais un homme qui s'en sort, qui va publier ses souvenirs de thérapie, qui va sortir de sa cellule, qui va être sauvé par la rédemption de sa mère..." J'ai été tellement déçue par cette réaction « Happy end », que j'ai juste répondu qu'il s'agissait de mon livre et que j'en étais l'auteur.
New York est la patrie d’adoption de Stecker, sa vraie ville pour laquelle il n’a que tendresse. Il y passe plusieurs jours d'escale par mois et la connaît par cœur. J'ai bien aimé écrire le passage d’immense solitude où il se trouve quand il fait l'amour avec une femme dont il ne se souviendra même pas du visage. Comme un point culminant de sa détresse amoureuse après avoir compris qu'il ne peut plus rien attendre de Nanouche, ni rien espérer de Micky. Cette jeune femme et Ralph sont de vrais amis pour lui et le resteront jusqu'à la fin. Malheureusement, il y a les obstacles de l'éloignement géographique et des activités prenantes dans la vie de chacun.
IL n'est pas si ignare que cela : il a fait des études importantes, il lit (Stoner, un roman que j'adore !), il raffole du jazz,  il tente d'être à la hauteur de sa compagne Nanouche qui le domine intellectuellement.
Nanouche est obsédée par son désir d'enfant, attisé par l'instrumentalisation de sa famille. Sans cet entourage, aurait-elle accepté la volonté de  Stecker de refuser la paternité ? Une chose est sûre : la paternité déroute et panique Stecker. Il n'a de modèle que son père défaillant, lâche et cupide. Il ne veut pas lui ressembler et ignore qu'il pourrait tourner le dos à cet unique modèle. C'est là, où on pourrait faire un reproche à la thérapeute Geneviève. : ne pas avoir montré à Stecker qu'on peut faire autrement dans la vie et que les figures parentales de notre enfance ne sont pas une fatalité répétitive. Sans doute, a-t-elle été débordée par les débordements permanents de Stecker.
Pour finir, je voudrais te parler de mon trouble. Je viens de finir "Le jour d'avant" de Sorg Chalendon, un auteur que j'adore. Il parle de borderline, ce qui n'est pas courant dans une fiction, et j'ai reconnu mon roman à de nombreuses occasions. Veux-tu bien le lire et me dire ce que tu en penses ? On dirait qu’il y a dans l’air du temps les mêmes préoccupations chez ceux qui écrivent. Toute mon affection. Ton amie Danièle.

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